L'absolue nécessité de recadrer l'administration burkinabè
TRANSFERT DES COMPETENCES ET DES RESSOURCES DE L’ETAT AUX COLLECTIVITES TERRITORIALES.
L’absolue nécessité de recadrer les choses.
A la faveur de la communalisation intégrale, l’Etat du Burkina Faso a décidé de transférer un certain nombre de ses domaines de compétences aux collectivités territoriales, notamment aux communes. Comme exemples de domaines transférés, on peut citer l’éducation et la santé entre autres. Mais au vu du comportement de certains édiles dans la gestion de ces domaines transférés, ce lecteur lance un cri d’appel aux autorités burkinabè; autorités auxquelles il demande de sauver «Hippocrate et Socrate des ambitions des prophètes déchus»
Le processus de communalisation intégrale amorcé en 2006 avait suscité beaucoup d’espoir de la part des populations qui fondaient leurs attentes sur le transfert des compétences aux mains de personnes intègres capables d’impulser le développement à la base. C’est d’ailleurs pourquoi, les élus locaux n’ont cessé pendant longtemps de revendiquer l’effectivité du transfert rapide des comptes; pardon, des compétences. Mais l’Etat ignorait dans sa candeur que le transfert des domaines aussi sensibles que l’éducation et la santé, équivalait, en partie, à la peine de mort pour Hippocrate et Socrate, qui se verront séquestrés par des pseudos représentants des populations, transformés pour la circonstance en entrepreneurs ou en fournisseurs. Cette nouvelle race d’intermédiaires de commerce, voguera entre les prestataires de services et les secrétaires généraux des mairies dont les sorts sont abandonnés aux griffes des politiciens vomis qui, ne devant leur ascension que par leur imposition par les états major de leurs partis politiques depuis Ouagadougou et ce, au mépris des choix des communautés à la base. Déjouant tous les pronostics et autres théoriques des bienfaits de la décentralisation, et poussés par leur goût prononcé pour le lucre et les intérêts personnels, certains élus finiront par fouler aux pieds la pitié, l’humanisme et la solidarité communautaire. Sinon, comment comprendre qu’un fonctionnaire moyen, maire d’une commune rurale qui peine à mobiliser 2 millions de franc CFA de recettes propres par an, puisse construire en moins de 6 mois une villa équipée dans une cité des forces vives? Comment expliquer que certains maires puissent exercer des pressions sur les Secrétaires Généraux des mairies, présidents des commissions d’attribution des marchés pour justement l’attribution des marchés ou la réception d’infrastructures en dépit des irrégularités constatées? Cela laisse voir sans ambigüité que les ressources sont transférées non pas aux communes elles-mêmes mais plutôt aux maires dans la mesure où ces ressources-là sont gérées de façon personnelle, opaque et unilatérale. Les budgets communaux sont généralement élaborés par le trio maire, comptable et SG de la mairie avant de les soumettre au conseil municipal pour adoption. Il va s’en dire que ce forgeron X, cet éleveur Y ou cet agriculteur lambda; tous, conseillers analphabètes et drapés de leur ignorance des arcanes de l’administration, ne pourront donc manifester aucune opposition face aux révélations du messie, et ce, malgré leur bonne foi. Le slogan de ces voraces est connu dans le milieu des initiés comme ce célèbre «Monsieur 10%» bien connu de tous au «pays des hommes intègres» et dont la carrière n’a cessé d’évoluer positivement (suivez bien et longuement mon regard). Cela a engendré un nouveau langage qui est : «Si je ne mange pas dedans, alors je ne signe pas». C’est d’ailleurs la seule phrase qu’ils maîtrisent parfaitement quand il s’agit de parler le français. Tout simplement parce qu’il y’a des francs CFA à palper. Ces rongeurs à l’appétit aiguisé sont entrain de souper dans des calebasses dorées. Ni les fournitures scolaires des élèves du primaire ni les médicaments des pauvres malades des CSPS ne sont épargnés. Aujourd’hui, les populations ligotées et à bout de force n’en peuvent plus. Il faut sauver nos braves paysans dont la confiance a été trahie par des mercenaires en mission commandée. Mais comment cette tactique machiavélique de la terre brulée est elle mise en œuvre par ses renégats ?
Pour passer Hippocrate à la guillotine, ces, «prophètes déchus» mettront tout en œuvre. L’interpellation de l’État pour le transfert effectif des compétences dans le domaine de la santé a été très longtemps au cœur des préoccupations des maires qui, par des politiques d’harcèlements vont obtenir gain de cause en 2013. Mais après seulement une année de gestion, l’édifice déjà fissurée menace de s’écrouler en anéantissant du coup les progrès engrangés depuis des décennies de dur labeur. La préoccupation des maires n’est plus comment améliorer la qualité des soins, mais comment profiter de cette manne en quantité. Bien qu’il y ait des lignes budgétaires prévues pour le fonctionnement des CSPC, on observe avec amertume des ambulances en tricycles complètement en panne et des commandes de gaz non effectuées soit parce que les marchés sont exécutés en fin d’année ou que les prestataires de connivence avec les maires ont été payés sans que le service n’ait jamais été effectué. Conséquences : les enfants, les femmes, les jeunes… continuent de mourir en silence dans nos campagnes; des femmes enceintes accouchent toujours à la maison ou elles meurent aux CSPS faute d’ambulance pour les évacuations vers les CMA.
Pour la fourniture en médicaments et consommables, certains maires ont désarticulé le système actuel d’approvisionnement en médicament, allant jusqu’à demander purement et simplement le désengagement des districts sanitaires dans la commande des médicaments pour s’octroyer ainsi le loisir de passer la commande en vertu de leur autonomie de gestion. De ce fait des maires politiquement assis ont essayé de développer leur propre circuit d’approvisionnement de médicaments en dehors de celui de la CAMEG qui demeure pourtant la norme requise en la matière. Leur indifférence face aux souffrances de populations se caractérise par le non approvisionnement des dépôts en médicaments de premières nécessités. Ce qui oblige les COGES à vider leurs caisses pour l’achat des médicaments pour ravitailler les CSPS. A ce jour nombreux sont les COGES qui sont en difficulté financière de par la faute de certains maires, marchands d’illusions qui ne pensent qu’à eux-mêmes d’autant plus que ni eux ni leurs familles ne résident souvent avec «les paysans».
Après avoir guillotiné Hippocrate, nos braves maires ont décidé d’empoisonner Socrate. La gestion rationnelle des ressources transférées oblige l’Etat à mettre du personnel qualifié à la disposition des communes. Paradoxalement, le personnel du MENA, dès la prise de service est le plus souvent confronté au boycott des maires qui les tiennent à l’écart des dossiers. Que cache cette méfiance des Bourgmestres si ce n’est la peur de ne pouvoir contrôler l’octroi des marchés publics à leurs fournisseurs attitrés en contrepartie de quelques royalties?! Faisant fi des spécifications techniques des manuels et matériels scolaires, les commandes des fournitures sont confiées à des amis qui les livrent à moitié. A quand donc le reste des fournitures? Disons plutôt à quand la retro-commission pour le maire? Ce «deal» est soupçonné par les DPENA et les Chefs des Circonscriptions de l’Enseignement de Base qui malheureusement n’ont aucune marge de manœuvre face à ces agissements indignes. Le péril de l’enseignement primaire se vit chaque année dans nos collectivités. Les élèves reçoivent leurs fournitures scolaires plusieurs mois après la rentrée scolaire et ce au grand dam des instituteurs frustrés et à qui des résultats sont exigés. L’intérêt personnel et la partialité des élus locaux se ressentent aussi dans le choix des sites de construction des nouvelles écoles; choix qui ne tient plus compte des distances ou de la nécessité des infrastructures mais de la volonté des maires qui préfèrent les diriger vers leurs préférences sans concertation préalable avec les services techniques du MENA. Et comme si cela ne suffisait pas, nombreux sont les élus locaux qui intervenaient dans le choix des membres des bureaux de l’APE dont ils téléguidaient la gestion.
Mais il n’est jamais tard pour bien faire. Au regard donc de tout ce qui a été évoqué, l’État doit ouvrir l’œil et veiller à ne plus sacrifier nos enfants et nos malades abandonnés aux mains des aventuriers d’un nouveau genre. Il faut réagir le plus vite possible sans remettre en cause les transferts des compétences. Pour ce faire, il faudra donc responsabiliser les techniciens de la santé via les districts sanitaires et du MENA à travers les DPENA pour l’élaboration des dossiers d’appel d’offre; responsabiliser les districts sanitaires pour la commande des médicaments et l’approvisionnement des dépôts et limiter le rôle des maires à celui d’ordonnateurs du budget. Cela y va pour la réussite de notre décentralisation dont la nécessité et l’importance ne sont plus à démontrer.
Que DIEU bénisse le Burkina Faso.
Un citoyen soucieux de l’avenir de son pays.
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